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L' HISTOIRE DE MLLE LENORMAND



MADEMOISELLE LENORMAND

5, Rue de Tournon


Cette petite rue parisienne pleine de charme, s'élevant avec grâce de la rue de Seine jusqu'au Palais du Luxembourg, abrite une vieille demeure mystérieuse qui hébergea tour à tour, au cours de sa longue histoire, quelques personnages pittoresques:

Le célèbre mage Cagliostro, mêlé à toutes les intrigues de la Cour, y trouva à plusieurs reprises un discret refuge, au cours des années 1780, durant lesquelles on le soupçonna d'être mêlé à la sordide affaire du "Collier de la Reine".

On dit que ce fut là, dans les souterrains qui reliaient le ci-devant hôtel Concini, (devenu Maréchal d'Ancre) au Palais du Luxembourg et à celui des princes de Condé, que le mage rencontra le comte de Saint-Germain et Franz Anton Mesmer avec qui il noua une mystérieuse et secrète alliance occulte.

Le journaliste Jacques Hébert, l'un des personnages les plus sinistres de la révolution, qui dirigea le redoutable "Père Duchesne", y résida jusqu'en 1792. Puis de 1797 jusqu'en 1840, ce fut au tour de la célèbre extralucide Marie-Anne Adélaïde Lenormand d'en occuper le rez-de-chaussée, après avoir quelque temps habité au N° 9 de la même rue.

Jacques Yonnet précise qu'elle ne choisit pas cette demeure au hasard. Ce fut la découverte, à l'aide d'un pendule, d'un passage secret reliant la cave du N° 5 de la rue de Tournon au fantastique réseau de galeries souterraines des anciennes carrières, permettant d'échapper en ces temps troublés, aux dangers révolutionnaires ou aux recherches de la police, qui la décida à s'installer dans cet immeuble.

MARIE-ANNE-ADELAÏDE LENORMAND

L'histoire de Mlle Lenormand, fille d'un drapier d'Alençon, est étonnante à plus d'un titre. Née en 1772, elle entra toute gamine à l'Abbaye Royale des Dames bénédictines de sa ville natale, où elle se fit remarquer dès le plus jeune âge par une ardente imagination et un curieux talent de prophétesse. Agée de sept ans, elle disait déjà la bonne aventure aux soeurs et, lorsque l'abbesse du couvent fut destituée, la petite Marie-Anne annonça que ce serait une dame de Livardie que l'on nommerait à sa place.

Cette prédiction fut bientôt confirmée par une nomination que le roi entérina! Vers 1787, placée en ville comme apprentie couturière, l'adolescente commença à tirer les cartes autour d'elle et s'attira une gentille renommée.

Ne tenant pas en place, consciente de son charme et de son talent, l'adolescente monta sur Paris où elle arriva à la fin des années 80. Elle se plaça comme vendeuse dans un magasin de frivolités de la rue Honoré-Chevalier, reprit ses prédictions et ses tours de cartes. Remarquée par Amerval de la Saussotte, un bel aristocrate amateur de frais minois, la jeune fille s'empressa de se mettre sous sa protection.

Elle demeura quelque temps auprès de lui et, pour faire taire les médisances, elle occupa officiellement la fonction de "lectrice".

PENDANT LA TERREUR

Mais en 1793, en pleine "Terreur", les Sans-Culottes vinrent arrêter son protecteur pour le guillotiner. Marie-Anne s'enfuit, échappant de justesse à la rafle, trouva refuge dans un garni proche du Palais-Royal, où elle rencontra dame Gilbert, une habile tireuse de cartes acoquinée à un certain Flammermont, un garçon boulanger qui n'avait pas froid aux yeux.

A eux trois, ils associèrent leurs talents. Déguisée en pythonisse tour à tour italienne, bohémienne ou gitane, la jolie Marie-Anne disait l'avenir, la Gilbert tirait les cartes cependant que Flammermont allait distribuer des prospectus et faire de la réclame auprès des commerçants du quartier.

LES FICELLES DU METIER

En quelques mois, Mlle Lenormand apprit toutes les ficelles du métier et, se sentant plus douée que ses compagnons, elle reprend sa liberté et s'installe à son compte, ouvrant un cabinet d'écrivain public, pour servir de couverture à ses activités en marge.

D'abord locataire au 9 de la rue de Tournon, puis au 5 , elle y résida durant près d'un demi-siècle, accueillant une clientèle nombreuse. En quelques années, Marie-Anne attira là tout ce qui comptait dans la capitale, à commencer par le gratin révolutionnaire et la classe de nouveaux riches qui se formait autour du naissant pouvoir. Elle reçut le peintre David, Robespierre, Saint-Just, Marat, Tallien, Talma, Garat et bien d'autres, ainsi que leurs hégéries ou leurs compagnes.

CONFIDENTE DE JOSEPHINE

Mais sa vraie fortune débuta lorsqu'elle s'attacha la ravissante Joséphine Tascher de la Pagerie, comtesse de Beauharnais, qui ne pouvait bientôt plus se passer d'elle et la consultait à tout propos.

Très habile, d'une rouerie consommée, usant à merveille de son instinct de devineresse, sans négliger les armes de la séduction ou de la galanterie, Mlle Lenormand sut profiter de toutes les confidences glanées sur l'oreiller et devant son "guéridon". La naïveté et la crédulité de ses célèbres consultants lui permirent aisément d'en séduire d'autres et de convaincre de nouvelles pratiques de ses dons de clairvoyance.

Surdouée et cultivée, elle joua sur tous les registres, usant de toutes les techniques de la divination, inventant au besoin de nouvelles mancies. Elle assimila les méthodes du sieur Alliette, étudia les anciens grimoires, fréquenta la Bontemps et Mlle de Cruzols, maniant les cartes avec adresse, lisant dans les lignes de la main ou le marc de café, jetant les aiguilles, consultant le plomb fondu, le vif argent, les blancs d'oeufs jetés dans l'eau claire, les miroirs brisés, le cristal de roche ou les cendres soufflées !

LE CABINET DE CONSULTATION

L'entrée de son appartement donnait sur la cour de l'immeuble, et l'on y accédait par un perron de trois marches. Après l'antichambre, on découvrait un salon orné de colonnades de stuc avec quatre bustes représentant Jupiter, Saturne, Mars et Mercure. Il était décoré d'un grand nombre de gravures et de tableaux, parmi lesquels "les Adieux de Louis XVI à sa famille" ainsi qu'un portrait en pied de la sibylle peint par David.

C'est dans ce salon que les consultants attendaient leur tour, avant d'être introduits par ordre de préséance, dans la chambre à coucher de la voyante. D'une pièce voisine, séparée du salon par une glace sans tain, une confidente de Mlle Lenormand observait et écoutait les bavardages, lui rapportant tous les petits potins qui pouvaient aider ses dons de voyance.

Ce salon, où régnait une sorte de désordre artistique assez remarquable, avec des vases de porcelaine de grand prix côtoyant d'exquis bibelots offerts par ses riches clientes, voyait défiler tour à tour, hommes politiques, banquiers, duchesses, femmes du monde ou du demi-monde, actrices en vogue disposés à payer très cher les paroles sybillines qu'elle distillait avec parcimonie.

                                                                                                                                                                                                         SUITE...
 by GIBBS & JO